Les données à l’échelle mondiale le démontrent : la privatisation des services publics n’est pas la panacée qu’on nous vend pour réduire les coûts. En fait, comme le souligne le rapport des Nations Unies sur la privatisation et la pauvreté publié en 2018, « les financements privés sont plus chers que les financements publics ».
Un rapport sur la sous-traitance publié récemment par l’AFPC et l’Union des employés de la Défense nationale (UEDN) montre à quel point les bases militaires de la Défense nationale n’ont souvent d’autre choix que de se tourner vers le privé, faute d’options.
Citons en exemple une note d’information où le commandant de la base des Forces canadiennes de Kingston affirme qu’il serait préférable de garder les services de nettoyage à l’interne, surtout dans les zones soumises à des règles de sécurité très strictes. Dans sa note, il explique qu’il n’est pas question de réduire les normes de nettoyage, mais qu’en l’absence d’une norme ou d’une stratégie nationale claire, la base n’a pas d’autre choix que de recourir à un fournisseur externe. La vérité, c’est que les bases militaires ont peu de marge de manœuvre avec leur budget. Les enveloppes salariales sont limitées et lorsqu’elles sont vides, le commandant doit puiser dans son fonds de sous-traitance, très bien garni d’ailleurs, même s’il juge que le travail devrait se faire à l’interne. Dans la note en question, le commandant souligne que la sous-traitance des services du nettoyage n’entraînera aucune économie. Au contraire, elle fera grimper les coûts de 35 % puisque les dépensent s’élèveront à 5,8 millions de dollars au lieu de 4,3. Les entreprises qui soumissionnent se réservent toujours une marge de profit, c’est pourquoi elles gonflent le coût de la main-d’œuvre et du matériel, tout en payant moins leur personnel.
Une étude menée en 2013 à la base de Kingston a clairement montré qu’on ne peut réaliser des économies qu’en réduisant la qualité du nettoyage, et que la quête de profits des sous-traitants a entraîné un certain laxisme ayant grandement miné la qualité des services.
« La norme de nettoyage est tombée bien en dessous de ce qui était requis pour le CMRC, surtout dans les espaces résidentiels où la propreté est essentielle. On a constaté que, pour augmenter leur marge de profit, les sous-traitants utilisaient des produits nettoyants de qualité inférieure ou inadéquats, ce qui occasionnait de l’entretien supplémentaire, des problèmes environnementaux et des problèmes de santé et de sécurité, lesquels se traduisaient par des conditions de vie inacceptables pour les cadets. » [notre traduction]
Sous-traiter = payer plus cher pour des services de qualité moindre
Supposons que la sous-traitance coûte 35 % de plus que le travail à l’interne. Les 250 millions de dollars dépensés en contrats de nettoyage et d’entretien des installations en 2020 représenteraient alors un excédent de 63 millions de dollars par rapport à ce que coûteraient ces emplois s’ils relevaient entièrement de la fonction publique. Les études dont dispose la Défense nationale montrent bien que la sous-traitance donne des « résultats inférieurs ». Il n’y a donc aucune raison valable de continuer dans cette voie.
Il est clairement plus coûteux et moins efficace de recourir à la sous-traitance que de faire le travail à l’interne. Au bout du compte, les fonds publics finissent dans les poches des actionnaires et des propriétaires. Les entreprises privées enlèvent du travail aux fonctionnaires, brouille les cartes, favorise le travail précaire et laisse les Canadiennes et Canadiens en plan. Qu’y a-t-il de bien là-dedans pour les Forces canadiennes et la population en général? Si ces entreprises devaient faire faillite, comme cela s’est produit récemment avec le géant britannique Carillion, que ferait le gouvernement?
- Consultez la version intégrale du rapport sur l’impact de la privatisation sur les services de défense, intitulé La sécurité d’abord : pour que cesse la privatisation des services à la Défense nationale.