Crise des soins de longue durée : Revera hausse l’offensive

Le rapport publié récemment par Revera a été rejeté unanimement parce qu’il n’est, de toute évidence, qu’un simple exercice de relations publiques visant à expliquer le nombre élevé de décès dans son réseau d’établissements de soins de longue durée à but lucratif lors de la première vague de la COVID-19. Revera est une filiale en propriété exclusive d’Investissements PSP, une société d’État qui gère la caisse de retraite de la fonction publique fédérale. Depuis plusieurs mois, les membres de l’AFPC exhortent le gouvernement fédéral à faciliter les pourparlers entre PSP et les ministères provinciaux de la santé sur la cession de Revera au secteur public.

Le rapport de 90 pages (en anglais) paraît alors que le mouvement national pour mettre fin aux soins de longue durée privés à but lucratif au Canada prend de l’ampleur. Revera prétend que ses recommandations éviteront aux résidents de ses établissements de souffrir davantage des effets de la pandémie. Pourtant, il n’est nulle part question d’un des facteurs de risque dont on parle le plus : le mercantilisme des soins privés de longue durée.

L’Association médicale canadienne, dans une étude sur la première vague de la pandémie, a révélé que, dans les établissements de soins de longue durée à but lucratif de l’Ontario ayant eu des flambées épidémiques, les résidents étaient disproportionnellement plus susceptibles de mourir que ceux vivant dans les établissements municipaux et publics. Compte tenu de ces résultats, on s’attendrait donc à ce que des experts indépendants examinent de plus près ces conclusions. Mais non, le rapport n’indique absolument rien à ce sujet.

Taux de décès toujours élevé

Nous sommes en pleine deuxième vague et tout démontre qu’encore une fois Revera n’assure pas la sécurité de ses résidents.

Les recommandations formulées par des experts choisis par l’entreprise elle-même, visent à améliorer les pratiques administratives et de fonctionnement dans le but de répondre aux préoccupations. La plupart du temps, Revera répond que la recommandation a déjà été mise en œuvre ou que sa mise en œuvre est en cours.

Si tel est le cas, comment Revera explique-t-elle les 53 éclosions, les 1 086 résidents infectés, les 619 membres du personnel infectés et les 222 décès dans ses établissements de soins de longue durée depuis septembre 2020? Le rapport n’offre aucune explication pour cette tendance inquiétante. En fait, on peut s’attendre à ce que les décès causés par la COVID-19 pendant la deuxième vague (222 en date du 8 décembre) dans ses établissements dépassent les 266 décès causés lors de la première vague.

Préoccupation de l’AFPC : Revera détenue par le régime de retraite

« Le rapport de Revera, ce n’est qu’un exercice de relations publiques, voire une tentative de disculpation, affirme Chris Aylward, président national de l’AFPC. Les membres de l’AFPC sont profondément préoccupés par le fait que Revera est détenue par le régime de retraite de la fonction publique. Afin d’offrir de bons soins à nos aînés, nous devons mettre fin aux profits dans les soins de longue durée. »

Passez à l’action : Dites au gouvernement de nationaliser Revera

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CONTEXTE : Piètre bilan pour les soins de longue durée à but lucratif

La pandémie a mis en lumière de profonds problèmes au sein des réseaux privés de soins de longue durée. Mais on le sait depuis longtemps, comme l’ont démontré des recherches approfondies, l’expérience des résidents est pire dans les établissements à but lucratif que dans les foyers publics. Voici certaines études importantes qui témoignent des piètres résultats dans ces réseaux :  

  • En 2015, une analyse (en anglais) de la situation en Ontario a démontré que les établissements à but lucratif ont un taux beaucoup plus élevé de mortalité et d’hospitalisation.
  • En 2009, une revue systématique de plus de 80 études (en anglais) a conclu qu’en moyenne, les maisons de soins infirmiers sans but lucratif offrent une qualité de soins beaucoup plus élevée que leurs homologues à but lucratif.
  • Selon un examen des établissements de soins de longue durée au Manitoba (en anglais), effectué en 2006, les résidents des établissements à but lucratif ont plus souvent tendance à avoir besoin d’un médecin ou à se faire hospitaliser en raison d’événements indésirables, comme des fractures de la hanche et des infections respiratoires. 
  • Une revue des tendances nord-américaines entre 1990 et 2002 (en anglais) conclut que les maisons de soins infirmiers à but lucratif semblent offrir des soins de moindre qualité dans plusieurs domaines importants liés aux processus et aux résultats.

D’autres études révèlent que les réseaux à but lucratif dépensent beaucoup moins d’argent sur les résidents et n’ont pas autant de personnel que les établissements publics sans but lucratif.

  • En 2020, l’Office of the Seniors Advocate of British Columbia a publié un rapport sur le secteur des soins de longue durée privés. Il appert que les établissements sans but lucratif dépensent 10 000 $, soit 24 %, de plus par année pour les soins de chaque résident que les établissements à but lucratif et que les foyers à but lucratif n’ont pas réussi à fournir 207 000 heures de soins directs aux résidents ».
  • En 2016, une étude sur la situation en Ontario (en anglais) a révélé que les établissements de soins de longue durée à but lucratif, en particulier ceux qui font partie d’un réseau, offrent beaucoup moins d’heures de soins directs.
  • Un rapport sur les soins de longue durée en Alberta (en anglais) rapportait, en 2013, qu’il n’y avait pas suffisamment de personnel dans les établissements à but lucratif pour bien s’occuper des aînés. En l’occurrence, les résidents étaient privés de 90 minutes de soins chaque jour.
  • Une étude de 2005 (en anglais) indique que les établissements sans but lucratif ont des niveaux de dotation plus élevés et que l’argent public donné aux établissements à but lucratif se traduit par beaucoup moins d’heure de soins pour les résidents comparativement aux établissements sans but lucratif.

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10 Décembre 2020