S.O.S. santé dans le Nord : les travailleuses et travailleurs ont besoin de renfort

Technicienne en pharmacie autorisée, Amanda Arsenault travaille depuis neuf ans à Rankin Inlet, assurant l’approvisionnement en fournitures médicales de huit centres de santé communautaire du Nunavut. Elle a toujours fait cavalier seul, malgré la complexité de l’approvisionnement dans les communautés nordiques, qui se fait par fret aérien. 

Dernièrement, son employeur a engagé une autre personne et Amanda est soulagée d’avoir enfin de l’aide, car même à deux, le travail s’accumule. 

L’AFPC représente environ 4 000 travailleurs et travailleuses de la santé au pays, et beaucoup sont dans la même situation, aggravée depuis la pandémie. Dans le Nord, le manque chronique de personnel pose problème depuis des dizaines d’années, et ne fait qu’empirer. 

C’est pourquoi Heidi Young, infirmière en santé communautaire au Nunavut, doit faire le travail de deux ou trois personnes. 

« Le modèle des centres de santé communautaire est excellent, affirme-t-elle. Les infirmières gèrent des programmes de vaccination, donnent des soins prénataux et bien plus. Mais la pénurie nous force à constamment régler ce qui est le plus pressant et ça laisse peu de temps pour la prévention. » 

Christian Norwick, infirmier des soins intensifs à Yellowknife, porte régulièrement d’autres chapeaux : il fait du ménage, communique avec des familles et participe à la réadaptation de patients, des tâches habituellement de concierge, de travailleur social et de physiothérapeute. 

Dans un milieu où il manque constamment de personnel, difficile de trouver quelqu’un à qui parler et pouvant partager la charge de travail. « Tous nos problèmes découlent de la dotation, explique-t-il. Les gens se font refuser des vacances et s’épuisent, d’où les lacunes grandissantes en matière de soins. » 

Selon Northern Health Care Matters, au lieu d’augmenter les effectifs, les gouvernements territoriaux paient des millions de dollars à des agences privées pour engager des contractuels – une solution inefficace et coûteuse.  

Les personnes ainsi recrutées ne font que passer et souvent, elles ne savent pas comment faire leur travail, même si elles gagnent deux ou trois fois plus que le reste du personnel. Cette situation ne fait qu’alourdir la charge de nos membres, déjà au bord de l’épuisement professionnel. 

De plus, les personnes à contrat sont rarement sensibilisées aux particularités culturelles de la population dont elles s’occupent. Offrir des soins de santé adaptés à la culture est essentiel à la réconciliation avec les peuples autochtones, mais comment y arriver quand la population est privée de services fiables? 

Amanda, Christian et Heidi en conviennent : il est temps que les gouvernements prennent au sérieux la crise dans le domaine de la santé. Dans le Nord, il faut commencer par offrir des salaires concurrentiels adaptés au coût de la vie et de bons emplois stables. 

« Au lieu de payer des agences privées, on pourrait adopter des solutions à long terme, comme des programmes de rétention, des mesures incitatives et la formation de professionnels dans le Nord, ou financer des programmes communautaires utiles aux gens de la région », avance Christian. 

La privatisation du réseau de la santé nuit aux travailleurs et travailleuses, aux patients et à leur famille. Les soins de santé doivent être conçus pour les gens du Nord et placer l’humain au centre de tout. 

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23 Janvier 2024