Le droit au télétravail : la nouvelle lutte des travailleuses et travailleurs 

C’est bien connu, les syndicats sont immanquablement les premiers à faire d’une politique « radicale » chose courante. Il fut un temps, par exemple, où on disait que la journée de travail de huit heures nuirait à la productivité des entreprises. L’idée d’une fin de semaine était alors un luxe irréaliste qui nuirait à l’économie. Avant de remporter leur lutte pour un congé de maternité payé en 1971, les femmes et les syndicalistes se sont heurtés à une forte résistance.  

Si on avait attendu l’aval du public pour faire avancer certains droits, on n’aurait jamais légalisé le mariage de personnes de même sexe, le droit à l’avortement ou le droit de vote des femmes, ainsi que bien d’autres droits qu’on tient pour acquis aujourd’hui.  

Récemment, l’imposition d’une journée supplémentaire de travail au bureau a déclenché un tollé chez les fonctionnaires fédéraux, qui se sont insurgés de cette politique régressive.

On aurait tort de penser que la situation ne concerne que les fonctionnaires fédéraux. Elle témoigne plutôt de l’interminable combat des syndicats pour l’ensemble du salariat. 

On nous rabâche de vieux arguments pour empêcher le télétravail de devenir la norme. Et ces faux raisonnements sont toujours aussi mal avisés. Que ce soit la journée de travail de huit heures ou le télétravail, c’est toujours le même combat : le salariat contre le statu quo du patronat. 

Lorsque la pandémie a frappé, notre façon de travailler a changé du jour au lendemain. On a alors « découvert » qu’il était tout à fait possible de travailler efficacement à la maison. De grandes sociétés comme X (anciennement Twitter) et Shopify ont effectué un virage complet vers le télétravail. D’autres employeurs n’ont pas tardé à les imiter. Commence alors une grande ruée vers l’or numérique, nombre d’entreprises s’empressant de lancer de nouveaux outils propices au télétravail. Et ça fonctionne.   

L’urgence d’agir s’étant estompée, de nombreux employeurs ressuscitent le vieux mythe selon lequel le travail en personne rime avec productivité. Comment expliquer que cette idée fausse demeure bien ancrée? Pourtant, la preuve n’est plus à faire : le télétravail améliore grandement la conciliation travail-vie personnelle et permet de réduire les émissions de carbone, sans nuire à la productivité.   

Ça n’a rien à voir avec le nombre de jours. Ce qu’il faut retenir, c’est que pour des dizaines de milliers de personnes, travailler à la maison est tout aussi efficace que de travailler au bureau.   

D’ailleurs, selon un sondage d’Abacus Data, près de 70 % de la population canadienne estime qu’il est bon de permettre aux gens de travailler à distance lorsque c’est possible. 

S’il faut du courage pour s’adapter au changement, la pandémie aura au moins fait tomber de nombreuses barrières, aidant à préparer l’avenir du travail.  

On l’a vu par le passé : les syndicats sont tout à fait capables de promouvoir des changements qui profitent à tout le monde, pas seulement aux personnes syndiquées. 

Comme ils l’ont toujours fait lorsque les droits de leurs membres étaient en jeu, les syndicats seront sur la ligne de front pour défendre le télétravail. Rappelons-nous que lorsque le personnel syndiqué obtient de meilleurs salaires, de meilleures conditions de travail et de meilleurs avantages sociaux, c’est tout le salariat qui en bénéficie, les autres employeurs devant alors faire concurrence à armes égales s’ils veulent embaucher les meilleurs talents.  

Les pressions en faveur du télétravail exercées par les syndicats de fonctionnaires pourraient bien se traduire par une nouvelle norme, contraignant tous les employeurs à innover, de sorte que la main-d’œuvre de demain soit plus heureuse, résiliente, inclusive et productive. 

En cette période charnière, il importe de se rappeler que lorsque les syndicats donnent le ton, c’est toute la société qui en bénéficie.  

Le droit au télétravail — dans la mesure du possible — doit être considéré comme étant la prochaine lutte des travailleuses et travailleurs. En menant ce combat de front, les syndicats continuent de faire ce qu’ils ont toujours fait : obtenir des gains progressistes qui améliorent les conditions de travail et la qualité de vie de tout le monde.  

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20 Juin 2024